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Bruce Lee, hommage au petit dragon.

mercredi 10 novembre 2010

Bruce Lee, né en 1940 et disparu en 1973, aurait eu 70 ans le 27 novembre 2010. Avant d’être acteur, c’était surtout un grand combattant, un maître en puissance [1] , un philosophe, un artiste.

5 films et un feuilleton. C’est ce qu’il a fallu pour le faire rentrer dans la légende et le rendre éternel. Bruce Lee a inspiré des générations de combattants en donnant sur scène ce qu’il avait mis tant d’années à construire en lui. En rupture avec les concepts de secret, de fermeture, il a au contraire cherché à transmettre son savoir dès ses études, en enseignant le wing Chun et le Kung Fu plus popularisé (ce qui lui a valu des ennuis [2]) puis en présentant ses techniques dans les films.

Cette ouverture, qui caractérise aussi le Yoseikan Budo, l’a poussé à confronter en permanence ses savoirs à la réalité du terrain et à proposer sa propre vision des arts martiaux dans "Tao of Jeet Kun Do" [3]. Je ne dirai pas méthode, lui même définissant le Jeet Kun Do comme l’art d’observer le monde et d’en faire l’expérience, son expérience. Le Jeet Kun Do selon Bruce Lee n’est donc pas fini, et aucun livre ou DVD ne peut proposer "la méthode ultime de Bruce Lee". Bruce Lee demandait simplement à ses élèves de vivre pleinement les choses. Et ne pas "devenir un vin coupé à l’eau" selon ses propres termes mais "une olive pleine de saveur et de différences". Il valait mieux selon lui connaître parfaitement quelques techniques que d’en survoler 100.

Son ouverture se traduisait par des séances d’entrainements avec des pratiquants de savate, de Muay Thai, de Taekwondo, de karaté, de Judo, de grappling... il affinait en permanence ses techniques et s’endurcissait, se musclait afin de ne pas être "trop" désavantagé en combat par sa petite stature [4]. Il a notamment intégré des coups de pieds de la savate, totalement absents du répertoire du Wing Chun et l’explique en toute transparence dans son livre à travers des planches de dessins explicites. Il explique par exemple que la puissance vient de la "translation"... par un mouvement qui part du pied, se transmet par la rotation de la hanche, et termine dans les extrémités... ça ne vous rappelle rien ?

Les médias grands publics ou parfois même plus spécialisés préfèrent insister sur les photos de Bruce s’entrainant sur le mannequin de bois, méthode héritée de son premier maitre, Yip Man [5]. Cela fait plus "chinois" certainement et cela masque la complexité de son approche, extrêmement moderne et empreinte de philosophie.

Bruce Lee, philosophe : to become different from what we are, we must have some awareness of what we are.

Les premières ligne de Tao Of Jeet Kun Do ne sont pas consacrées au corps, à la technique. Mais au coeur, à l’âme, à la philosophie. Etonnant ? Absolument pas. Bruce Lee était inspiré par Confucius, Spinoza, Krishnamurti, le bouddhisme, et par en gros, tout ce qui pose des questions... C’est d’ailleurs pendant ses études de philosophie à l’université de Washington qu’il rencontre sa future femme, Linda Emery, une jeune étudiante, en lui donnant des cours de kung-fu. Bruce Lee écrit, peint, danse, s’amuse. On est loin du cliché du maitre qui s’isole 2 ans dans la montagne pour revenir transformé en machine à tuer. C’est en ça qu’il est un modèle réaliste de ce que l’on peut accomplir : aspirer à devenir meilleur, sans oublier de vivre.

Bruce : un ange ?

Alain m’a fait remarqué que mon article n’était pas très distancié. Il a bien raison. Bruce Lee avait certainement des défauts, mais il semble qu’il y ait peu de littérature à ce sujet et j’avoue ne pas avoir d’éléments pour apporter des critiques fondées sur le personnage. Les écrits de sa femme (donc encore moins distanciés) parle d’un personnage entier (caractériel ?) qui ne s’embarrassait pas de courbettes avec les indésirables. Des relations avec la pègre chinoise sont évoquées par ci (financement des films), des prises de drogues par là (il fumait ou mangeait du hachisch... et prenait des analgésiques, à priori pour calmer ses douleurs liées à son accident). Bref, il semble donc que l’histoire n’ait retenu que les bons cotés du petit dragon et c’est tant mieux car les ragots sur les grands sportifs d’aujourd’hui par exemple m’agacent au plus haut point. Qui a couché avec qui, qui a trompé qui, qui a sacrifié quoi...

Avant de conclure cette petite bafouille, je lui laisse un peu la parole à travers des morceaux choisis qui peuvent vous amener à réfléchir sur vos propres techniques, vos propres conceptions des arts martiaux (désolé j’ai la flemme de traduire) :

"To understand martial arts, you must study all of natural movement in all living things ... absorbing martial art is like the experience of buddhism. The feeling for it comes from the heart. When it becomes part of you, you know you have it. You succeed at it. You may never fully understand all of it, but you keep at it. And as you progress, you know the true nature of the simple way. You experience a life you never had before". [6]

"i hope martial artists are more interested in the root of martial arts and not the different decorative branches, flowers or leaves."

"Why do individuals depend on thousands of years of propaganda ? They may preach "softness" as the ideal to "firmness", but when "what is" hits, what happens ? Ideals, principles, the "what should ne" leads to hypocrisy.

"The height of cultivation runs to simplicity. Half way cultivation runs to ornamentation".

Pourquoi un hommage à Bruce Lee sur un site de Yoseikan Budo ? Parce que son approche des arts martiaux est résolument moderne et empreinte de sens ; qu’elle prône l’ouverture, la simplicité, l’efficacité, la liberté, le changement et qu’elle utilise un ensemble de techniques dans le but de faire mieux.

C’est dans cet esprit que l’on travaille au club. Hiroo Mochizuki et Bruce Lee ont tous les deux, à des époques semblables, repensé, travaillé, en s’affranchissant des "écoles traditionalistes". Ils ont tous les deux mis en avant les fondamentaux des arts martiaux, ont oublié les "décorations" comme disait Bruce, en les confrontant à la réalité du terrain. C’est une voie plus difficile à comprendre et on voit bien que malgré ses films, le Jeet Kun Do de Bruce Lee reste confidentiel. Comme le Yoseikan. Et pourtant...

Par J Moss. 2010.

Notes

[1] En puissance car il n’a pas eu le temps de le devenir réellement, il n’avait pas encore trouvé toutes les réponses sur lui-même à sa mort, il disait que "l’univers lui avait lancé un défi"... texto

[2] Il lui a fallu combattre un maitre chinois pour avoir le droit d’enseigner à des "non-chinois"

[3] Ecrit lors d’un long séjour à l’hôpital suite à une blessure au dos

[4] Il parle déjà de fitness dans ses différents livres, et de programmes d’entrainement

[5] Une série de trois films retrace la vie de Yip Man. A voir impérativement

[6] Tao Of Jeet Kun Do, introduction